CGT du Crédit Agricole Des Savoie

Organisation du Travail et harcèlement moral

ORGANISATION DU TRAVAIL

            ET HARCELEMENT MORAL !!! (RPDS Juin 2010)

 

Toujours plus, toujours mieux, toujours plus vite.

 

La chape de plomb de l’organisation du travail engendre aujourd’hui une tension permanente, un épuisement, un stress parfois fatal.

Insérée dans le Code du travail par une loi du 17 janvier 2002, la notion de harcèlement moral n’a pas eu l’heur de plaire au patronat puisque, dès mars 2004, le Medef proposait de supprimer du Code du Travail les dispositions relatives au harcèlement moral.
Cette hostilité s’explique par la volonté de ne pas mettre en cause l’organisation du travail, chasse réservée du chef d’entreprise.

Mais comment nier aujourd’hui les méfaits de l’organisation et de la désorganisation du travail sur la santé physique et morale des salariés ? Les restructurations, les mutations précipitées sans concertation, les objectifs difficiles à réaliser ont harcelé et rendu anxieux de nombreux salariés, cadres y compris, au point de provoquer des tentatives de suicide et suicides.

Après avoir tenté d’imputer ces suicides à des problèmes personnels, les dirigeants d’entreprise sont aujourd’hui obligés de reconnaître leur caractère professionnel. Ils tentent certes d’éviter des condamnations pour accident du travail avec faute inexcusable, mais cela devient difficile en raison de la jurisprudence naissante et sévère.

Dans ce contexte, l’accord national du 26 mars 2010 sur le harcèlement et la violence au travail doit être apprécié, malgré ses insuffisances, à sa juste valeur. En effet, la fermeté et l’unité des organisations syndicales ont permis d’imposer au patronat que soient reconnus comme concourant au harcèlement des organisations du travail, des fonctionnements et modes de management.

Cela doit permettre aux salariés et à leurs représentants dans chaque entreprise de contester et proposer d’autres organisations prenant en compte le travail réel.


Qu’est-ce que le harcèlement moral ?

1)      La pratique du harcèlement moral

«Le harcèlement au travail n’est pas nouveau, il est aussi vieux que le travail» (C DEJOURS). 

 

 

Ce qui est relativement récent, en revanche, c’est la médiatisation, salutaire de ce fléau : Elle a probablement permis une plus grande prise de conscience ainsi qu’une déculpabilisation des salariés victimes de ces pratiques.  

 

Aujourd’hui, le harcèlement moral pratiqué dans les entreprises ne répond pas toujours aux mêmes objectifs. Il est possible de les synthétiser ainsi :

  • le harcèlement gratuit et pervers mis en œuvre simplement pour détruire,
  • le harcèlement mis en œuvre à l’encontre de salariés que l’on veut voir partir,
  • le harcèlement «managérial» mis en œuvre dans le cadre d’une stratégie de gestion où les salariés sont durement mis en concurrence dans un souci de rentabilité (management par le stress).

Les pratiques de harcèlement sont diverses et variées mais certains agissements reviennent fréquemment : les agressions verbales (menaces, injures), plus rarement physiques :

 

  • les comportements méprisants ou dégradants : sarcasmes, humiliations, brimades, mises à l’écart des collègues, critiques ou sanctions disciplinaires injustifiées...,
  • la mise au placard : peu ou pas de travail demandé, missions absurdes, mise à l’écart d’un groupe de travail, non invitation aux réunions, privation de primes, carrière stagnante, affectation d’un bureau sans  matériel, local inadapté ou isolé, etc.,
  • des conditions de travail anxiogènes : surveillance permanente et tatillonne exercée sur le salarié, fixation d’objectifs inatteignables dans le délai imparti, injonctions contradictoires, etc.

 

1)      La définition légale

 

 

Le harcèlement moral est défini par l’article L. 1152-1 du Code du travail comme des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié susceptible de porter atteinte à ses droits, â sa dignité, d’altérer sa santé physique et mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
La définition légale du harcèlement moral ne fait aucune distinction selon la provenance des actes de harcèlement. Ceux-ci peuvent être le fait de l’employeur, d’un supérieur hiérarchique, d’un groupe de salarié, d’un simple collègue.

Pour clarifier cette définition diversement interprétée par les juges du fond, la Cour de cassation a décidé de reprendre en main le contentieux du harcèlement moral en 2008. L’émergence des questions liées au harcèlement moral managérial et la nécessité d’harmoniser la jurisprudence ont conduit la Cour de cassation à contrôler de façon plus stricte l’usage de la notion de harcèlement par les juges du fond. Ces derniers doivent respecter certaines règles méthodologiques lorsqu’ils recherchent l’existence d’un harcèlement, règles issues d’un mécanisme probatoire particulier en la matière.

 

2)      Caractère et conséquences des actes de harcèlement

La reconnaissance du harcèlement moral requiert 3 éléments :                             

  • L’existence d’un comportement répétitif
  • La dégradation des conditions de travail
  • La survenance ou le risque de survenance d’un dommage

 

      a)  Caractère répété des actes de harcèlement

 

 

Les actes du harceleur doivent avoir un caractère répétitif. Par exemple, le supérieur hiérarchique d’une salariée qui se livre de manière répétée et dans des termes humiliants à une critique de l’activité de cette dernière en présence d’autres salariés se rend coupable de harcèlement moral.
Le caractère répétitif des actes ne signifie pas que c’est le même acte sous la même forme qui doit se répéter. Certains actes, en raison de la diversité de leur forme, peuvent donner l’apparence d’actes isolés. Mais leur addition permettra d’identifier le harcèlement. «C’est la répétition et la systématisation d’attitudes, de paroles, de comportements qui, pris séparément peuvent paraître anodins, mais qui rendent à la longue destructeurs ».

Du fait de l’exigence d’agissements répétés, le harcèlement moral s’inscrit nécessairement dans le temps. Ce qui ne signifie pas que la répétition des actes doit se produire sur une longue durée. Tout dépend des circonstances et de la nature des actes dont le salarié est victime. La Cour de cassation a récemment confirmé cette approche.  Désormais, le principe est très clair : «Les faits constitutifs de harcèlement moral peuvent se dérouler sur une brève période». « Le salarié n’a pas d’autre obligation que d’établir des faits permettant de présumer qu’il est victime de harcèlement moral ».

 

 

b) Dégradation des conditions de travail


Les actes répétés de harcèlement doivent avoir pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail. Cela signifie qu’il importe peu que ces actes soient volontaires ou non.
Ce principe a été affirmé par la Cour de cassation dans un arrêt du 10 novembre 2009. Il n’est pas nécessaire, pour le salarié victime de harcèlement qui saisit le juge, de montrer l’intention malveillante du «harceleur». Ce qui importe, ce sont les conséquences des actes du harcèlement, leurs effets éventuels sur le salarié

 

 

c)  Conséquences de la dégradation

 

Le harcèlement moral peut être établi et donc condamné, même en l’absence de préjudice sur la personne qui le subit. Peu importe donc que le harceleur soit parvenu à ses fins, son comportement suffit pour caractériser l’infraction.
Aux termes de la loi, le harcèlement moral est constitué lorsque la dégradation des conditions de travail subie par le salarié est susceptible des répercussions suivantes :   porter atteinte à ses droits et à sa dignité, altérer sa santé physique et ou mentale, compromettre son avenir professionnel.

 


Ces trois éléments sont alternatifs et n’ont donc pas à être réunis.

 

Comme nous l’avons déjà précisé, il n’est pas nécessaire que les actes de harcèlement se traduisent par un dommage avéré pour le salarié ; ils doivent être seulement susceptibles de porter atteinte à ses droits, à sa dignité, à sa santé ou à son avenir professionnel. Ainsi, les juges ne peuvent rejeter la demande du salarié au seul motif de l’absence de relation entre l’état de santé et la dégradation des conditions de travail. En outre, l’altération de l’état de santé du salarié n’est pas nécessaire à caractériser, dès lors que d’autres conséquences (ou risques) peuvent être déplorées. II en est ainsi lorsque les actes de harcèlement sont susceptibles d’avoir des répercussions négatives sur l’exécution du travail du salarié et sur sa carrière professionnelle.

 

    4) Le harcèlement managérial

 

Alimentée par une actualité brûlante et la multiplication des suicides dans certaines entreprises, cette question est montée en puissance tout au long de l’année 2009 : peut-il exister des formes collectives de harcèlement moral ? L’exercice du pouvoir de direction de l’employeur peut-il dégénérer en harcèlement moral impliquant un groupe de victimes ?

 

Réponse de la Cour de cassation dans un arrêt du 10 novembre confirmé depuis : oui, certaines méthodes de gestion peuvent être génératrices de harcèlement moral donnant à ce dernier un aspect collectif.

 

 Le principe posé par la Cour de cassation est particulièrement clair :


«Peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de gestion mises en œuvre par un supérieur hiérarchique des lors qu’elles se manifestent, pour un salarié déterminé, par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale, ou de compromettre son avenir professionnel. »

 

Dans un arrêt plus récent, la Cour de cassation enfonce le clou : sont retenus comme éléments constitutifs de harcèlement un management par objectifs intensifs et des conditions de travail extrêmement difficiles se traduisant, en ce qui concerne la victime, par la mise en cause sans motif de ses méthodes de travail notamment par des propos insultants et un dénigrement (au moins à deux reprises en présence de collègues), ayant entraîné un état de stress majeur nécessitant un traitement et un suivi médical .

 

L’origine des actes de harcèlement peut être donc de nature diverse. Il peut s’agir d’actes visant un ou plusieurs salariés déterminés, mais aussi de pratiques collectives, inhérentes à des méthodes de gestion. Par exemple: des circuits de décision opaques, des directives contradictoires, des exigences de productivité et de qualité inconciliables, une mise en concurrence des salariés, une surveillance abusive, une grande flexibilité des horaires et des lieux de travail, etc. Certes, de tels actes portent préjudice à l’ensemble des salariés. Mais l’action en justice, pour aboutir, reste individuelle car propre à chaque salarié : le harcèlement moral ne peut être constaté qu’à l’égard d’une victime à la fois. Pour obtenir réparation, le salarié doit donc faire état des conséquences sur sa propre personne, existantes ou susceptibles d’avoir lieu, des méthodes de gestion de l’employeur. Ce qui n’empêche pas, bien au contraire, un regroupement des demandes des salariés pour montrer qu’il ne s’agit pas de cas isolés mais d’une politique mise en œuvre au sein de l’entreprise.


 

Toute ressemblance avec le Crédit Agricole…  

...    N’est malheureusement pas fortuite  

Car nous souffrons au quotidien

  • de la diminution continuelle des effectifs,
  • d’heures supplémentaires non reconnues,
  • d’objectifs démesurés et du suivi permanent et tatillon qui en découle
  • de la vente au forcing,
  • de la mise en concurrence des salariés,
  • de la non reconnaissance du travail réel et de la culpabilisation des salariés (manque d’organisation, incompétence disent-ils)…

 

Cette liste non exhaustive mérite une réaction à la hauteur des enjeux pour garantir :

 

            Notre santé physique et morale

            Notre bien être au travail

            Notre équilibre familial

            La reconnaissance et le respect

 

 

 



28/09/2010
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