CGT du Crédit Agricole Des Savoie

LA SECU FACE AU DEFI SANITAIRE

La Sécu face au défi sanitaire.
Dans Le défi des épidémies modernes, André Cicolella développe des propositions pour sauver la Sécurité sociale. Le chercheur, estime que des solutions démocratiques peuvent contrer la dérive assurancielle qui menace.

NVO— Au-delà des questions de financement de la Sécurité sociale, vous évoquez l’importance de l’enjeu sanitaire. Qu’en est-il?
André Cicolella— On essaie
toujours d’expliquer que la crise de la Sécu et du système de santé est d’ordre financier, alors qu’elle est avant tout de nature sanitaire. Il y a bien sûr un problème de financement, qui tient à diverses causes, dont la principale est l’épidémie de maladies chroniques: les cancers, les maladies cardio-vasculaires, les affections mentales, le diabète... lesquelles représentent 85 % des dépenses des affections de longue durée. Tout cela engendre évidemment des dépenses, avec un coût global du traitement du diabète de i,8 milliard d’euros, soit l’équivalent des rentrées attendues des fameuses franchises que veut instaurer le gouvernement. Dans mon livre, montrant d’où viennent les dépenses de santé, j’invite à agir sur les causes. De cette manière, nous aurons à la fois une population en meilleure santé et des dépenses qui déclinent.
Agir sur les causes, d’accord, mais de quelle manière?
Notre système de santé est essentiellement basé sur un certain type de soins, tandis que l’éducation et l’environnement sont négligés. Pourtant, agir sur l’environnement, c’est intervenir sur tous les facteurs de risques environnementaux: au travail, dans la sphère domestique, sur la pollution urbaine, la qualité de l’eau. Ces risques se cumulent. L’éducation touche au comportement
et à l’alimentation. D’où l’importance des cantines scolaires, le développement de l’alimentation biologique et aussi de l’activité physique qui a un impact notamment sur l’obésité infantile. Aujourd’hui on agit peu sur l’obésité, alors que c’est l’une des causes de l’augmentation du diabète. Dans cette affaire, les industries chimique et pharmaceutique ont une lourde responsabilité, de même que l’agro-alimentaire et la publicité. Sanofi-Aventis, par exemple, espère faire trois milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel en nous vendant un médicament contre l’obésité. On peut donc dire que ces industries espèrent vivre de ce phénomène et non le combattre. Agir ainsi sur l’environnement et l’éducation permettrait, en revenant au taux des affections de longue durée d’il y a seulement dix ans, de récupérer des milliards d’euros et d’équilibrer le régime. Ce n’est pas une utopie. Les pays scandinaves ont fait ces choix avec un certain succès. La Suède a interdit la publicité alimentaire destinée aux moins de douze ans. La Finlande et le Danemark ont réduit la consommation de sel, surtout celui qui est incorporé dans l’alimentation industrielle. Passer de dix grammes de sel par jour à six grammes, permet de baisser de 22 % les accidents vasculaires cérébraux et de i6 % les infarctus du myocarde. Des résultats considérables peuvent donc être obtenus par des efforts qui n’ont rien de colossaux.
 Votre ouvrage évoque aussi le rôle de la gouvernance de la sécurité sociale. Vous proposez une « démocratie sanitaire»: qu’entendez-vous par là?
On voit bien que le paritarisme dans sa forme actuelle est à bout de souffle. Cependant, je m’étonne que le syndicalisme ne valorise pas plus le mode de représentativité du régime de Sécurité sociale d’Alsace-Moselle. Son conseil d’administration comporte 25membres, dont
22 syndicalistes et trois employeurs qui ne sont là qu’à titre consultatif Or ce régime est excédentaire, couvre tous les forfaits et bénéficie d’un indice de satisfaction de la population de 98%. Je trouve extraordinaire qu’on n’en parie pas plus, d’autant qu’il y a quand même la menace des privatisations sur le modèle des Pays-Bas, où l’on gère désormais la Sécu comme une assurance automobile. C’est bien là la finalité des réformes Sarkozy, une logique qui ne résout ni les problèmes financiers ni les problèmes sanitaires mais, au contraire, les aggrave.

Le défi des épidémies modernes, comment sauver la Sécu en changeant le système de santé (Éd. La Découverte, 140 p, 9€).

 



05/07/2007
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